Rapport sur le cercle de réunion ordinaire de Solvency II Wire de septembre 2015

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Cet article a préalablement été publié en anglais le 19/09/15. Toutes les citations directes doivent être confrontées à leur version originale en anglais.
2 septembre 2015, 14 h 30 – 17 h 00, Paris
Ont assisté à la réunion les membres des organismes suivants : AXA-IM, Covéa, CPR AM, GEMA, ICMIF, FNMF, Milliman, Pictet Asset Management, S&P, SGCIB.
Président : Gideon Benari, rédacteur en chef de Solvency II Wire
Le groupe de réunion ordinaire de Solvency II Wire rassemble une grande variété de professionnels dans le but de discuter de Solvabilité II et des questions y afférentes. On trouvera ci-après un résumé des principaux sujets de discussion abordés au cours de la réunion.


Environnement de taux bas

La faiblesse des rendements actuels a dominé l’ordre du jour de la discussion consacrée au 1er Pilier. Un participant a mis la situation en perspective, en rappelant qu’en 2013, les assureurs s’inquiétaient déjà de la faiblesse des taux d’intérêt, alors que les rendements des obligations d’État européennes à 10 ans se situaient autour de 2 %. Avec des taux proches actuellement de 0 %, la situation est devenue alarmante.
Il a été noté que les incidences de cet environnement à faible rendement différaient dans les États membres en fonction des mix produits proposés par les assureurs et des comportements d’investissements habituellement observés.
Le marché français par exemple est dominé par les produits non garantis avec participation aux bénéfices. Cela était généralement vu comme un facteur positif. L’activité principale d’investissement consistait à mettre en œuvre des stratégies de superposition (« overlay ») de taux d’intérêt pour soutenir la diversification. Il a été constaté que les entreprises s’intéressaient aux produits de couverture et aux investissements non libellés en euros. Le marché est un utilisateur traditionnel de produits structurés (par exemple Euro Medium Term Notes et émissions d’entités ad hoc, SPV).
En revanche, les assureurs britanniques étaient beaucoup plus attachés à gérer l’écart de duration entre l’actif et le passif (principalement pour les activités de rentes) et, en dehors de l’exploration frénétique des structures adaptées à l’ajustement égalisateur (Matching Adjustment), l’activité d’investissement était concentrée sur la génération de rendement.
Il a également été noté que, historiquement, le marché britannique a toujours été un marché très sophistiqué et facilement enclin à investir dans des produits non traditionnels. Un participant a affirmé que la recherche de rendement conduisait à de nouvelles formes de crédit et qu’il était maintenant courant en Grande-Bretagne que des investisseurs de taille moyenne détiennent une part non négligeable de leurs actifs dans des crédits non traditionnels (obligations adossées à des créances [CLO], prêts à effet de levier [LBO], etc.).
Une comparaison a été effectuée avec le marché espagnol des rentes, pour lequel l’adossement est très bon et qui génère un rendement élevé pour les assureurs du fait de la typologie des produits et de la stratégie d’investissement mise en œuvre.
Il a été observé que les marchés espagnols et italiens étaient moins guidés par la nécessité de rechercher à tout prix des solutions d’investissement, mais que certaines entreprises commençaient s’intéresser aux stratégies de réinvestissement.

Modification des allocations d’actifs, en réaction à la crise chinoise

La récente chute du marché boursier chinois a suscité un débat sur la nature de l’allocation des actifs à risque pour les assureurs. Un participant a fait remarquer que, compte tenu de la charge de capital prévue par Solvabilité II, les assureurs abordaient encore avec prudence les investissements en actions dans leurs allocations d’actifs stratégiques à long terme ; certains pourtant adoptaient une approche opportuniste des investissements en actions et profitaient des conditions du marché en prenant des positions tactiques.
Comme le faisait remarquer un autre participant : « Si vous aviez pris la position tactique de renforcer de 5 % votre allocation d’actifs en actions sur le 1er trimestre 2015, vous auriez obtenu un rendement équivalent à celui de 95 % du reste de votre portefeuille sur l’année complète.
Cela a provoqué un échange de vues sur le niveau d’attention qu’il était souhaitable de porter à la charge de capital prévue par Solvabilité II.
Mais il était généralement admis qu’une grande partie de la réduction des actifs risqués des assurances avait eu lieu avant 2008. Pour la plupart des grandes entreprises, la réduction n’a pas été le fait de Solvabilité II. Un participant a noté que de nombreux assureurs mutualistes ont subi des pertes au cours de la récente crise financière et s’avéraient peu enclins à accroître leurs positions sur des investissements plus risqués.
La discussion, et la diversité des exemples rapportés se contredisant l’un l’autre, ont montré combien il s’avérait complexe d’appréhender et de prévoir l’impact que pourrait avoir Solvabilité II sur les allocations d’actifs des assureurs.

Infrastructures

L’investissement dans les infrastructures, en tant que classe d’actifs, permet d’illustrer et de comprendre l’impact de Solvabilité II sur les allocations d’actifs.
Un participant a remarqué qu’investir dans les infrastructures devenait compliqué, du fait notamment de la pénurie de titres disponibles, de plus en plus d’investisseurs se tournant vers des actifs moins liquides. « Tout le monde recherche des titres qui sont en nombre limités, ce qui a pour effet de réduire considérablement le rendement », a-t-il expliqué.
Pour illustrer ceci, les participants ont souligné la dette d’infrastructure à 10 ans rapportait actuellement de 2 % à 2,5 % en moyenne et que certains titres offraient même une prime d’illiquidité de 0 %.
Un autre participant a indiqué qu’après une phase de désintermédiation, les banques retrouvaient leurs activités d’intermédiaire et pouvaient prendre ferme les transactions de financement qu’elles structuraient. Cela contribuait également à faire pression sur les rendements.

Produits et complexité

La rudesse de l’environnement financier a également eu comme conséquence inattendue de complexifier l’activité des compagnies d’assurance, qui se tournent vers des solutions d’investissement de plus en plus sophistiquées pour tenter d’optimiser les rendements. Il a été observé que cela augmente la charge pesant sur l’équipe dirigeante qui doit en outre continuer de gérer la complexité de Solvabilité II.

Application de la clause de grand-père sur les actions

Les règles sur l’application de la clause de grand-père sur les actions (passage de la charge en capital de 22 % à 39 % en 7 ans) continuent de faire débat et de créer de l’incertitude. Bien que ces règles fassent partie intégrante de la réglementation, leur interprétation a donné lieu à une discussion animée. Il est encore difficile de dire si les sommes investies dans les fonds d’investissement collectifs avant le 1er janvier 2016 bénéficieront ou non de la clause de grand-père.
Un participant a fait remarquer que le Trésor français et les autorités de surveillance ne s’étaient pas encore mis d’accord sur l’interprétation. Normalement, cela devrait être précisé dans le projet de texte de Niveau 3 que l’AEAPP est censée publier dans les prochaines semaines.

Solvabilité II peut améliorer la capitalisation

Un participant a fait remarquer que certaines mutuelles qui ont maintenant un écart de duration négatif auraient de fait vu leur capitalisation augmenter sur la période 2013-2015 en vertu des règles de Solvabilité II.
Les mutuelles, qui vendent principalement des contrats vie avec participation aux bénéfices sans engagement minimum de taux d’intérêt sur le long terme, étaient censées bénéficier de ces règles, puisque Solvabilité II aurait dû augmenter à court terme la valeur des actifs obligataires lorsque les taux d’intérêt sont faibles ; toutefois les estimations des provisions techniques (ou « best estimate liabilities ») n’ont pas toutes vu leur valeur augmenter  de la même façon, du fait des caractéristiques de participation discrétionnaire des contrats.

Autres considérations d’investissement

Une question a été soulevée quant à l’impact de la COP 21 ou Conférences des membres de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques qui se tiendra à Paris en décembre. Un gestionnaire d’actifs a répondu qu’environ deux tiers des nouveaux appels d’offres intégraient désormais certains éléments d’Investissement socialement responsable (ISR).

Commentaires sur l’exercice ORSA 2014

Comme le 2e rapport ORSA blanc doit être remis le 18 septembre au plus tard, les participants ont fait part de leur expérience et de leurs réflexions sur la procédure ORSA et la rédaction du rapport d’ORSA de l’année passée L’ACPR avait demandé de couvrir les trois évaluations de l’ORSA, contrairement à ce qui était prévu dans les orientations préparatoires.
Il était généralement admis que de nombreux assureurs avaient trouvé le processus de l’ORSA difficile et que cela avait demandé beaucoup de travail avant que l’entreprise ait pu en tirer parti.
Les participants ont aussi mentionné les différents degrés d’avancement sur le marché français. Les grandes entreprises ont trouvé le processus de l’ORSA plutôt facile, du fait qu’elles recouraient déjà à des processus de gestion du risque au niveau de l’entreprise et qu’elles disposaient de plus de ressources. Elles ont ainsi trouvé que l’ORSA était plutôt pertinent pour elles. Les petites entreprises ont quant à elles encore eu du mal à appréhender les concepts de base de l’ORSA et ne disposaient pas de suffisamment de personnel et de ressources financières.
Certains ont estimé qu’un grand nombre d’entreprises avaient eu du mal avec l’exercice 2014 parce qu’elles avaient été incapables d’impliquer suffisamment leurs équipes dirigeantes du fait des délais de livraison très courts. De nombreux assureurs ont terminé leurs travaux ORSA au cours de l’été 2015 seulement et n’ont pas eu suffisamment de temps pour en évaluer correctement les résultats. Un participant a même demandé s’il n’était pas trop tôt pour introduire l’ORSA sur le marché français.
Malgré ces réserves, les participants ont été d’accord pour dire que la tendance générale allait dans le sens de la création (de plus en plus) de valeur grâce à l’ORSA et qu’il fallait s’attendre à ce que les résultats de cette année s’améliorent sensiblement.
Les participants ont aussi soulevé des questions sur l’utilité et l’efficacité de recourir à des conseillers externes pour les travaux de l’ORSA, puisque, comme un assureur l’a relevé : « le ‘O’ d’ORSA veut dire own (interne). »  Un contre-argument a été avancé, selon lequel les conseillers externes avaient l’avantage d’avoir travaillé sur plusieurs ORSA et que ces références comparatives pouvaient être utiles.

Rapport ORSA et implication de l’équipe dirigeante

Il est apparu clairement que de nombreux assureurs ont eu du mal avec le lien entre le processus d’ORSA et le rapport ORSA. Un participant a affirmé que le rapport devait refléter le processus et non l’inverse. « Le rapport devrait être le produit des travaux », ont-ils souligné. Ils ont décrit l’ORSA comme un macro-processus qui faisait appel à un grand nombre de fonctions et de contributeurs différents et qu’il fallait un point central pour coordonner ces activités au sein de l’entreprise.
Il y avait un consensus pour dire que l’implication de l’équipe dirigeante dans l’ORSA était essentielle pour le succès de l’entreprise.
Il a également été noté que, du fait que les membres des équipes dirigeantes de nombreuses mutuelles n’étaient pas des professionnels de la finance et qu’ils étaient davantage axés sur les questions de gestion quotidienne plutôt que sur les perspectives à long terme, il serait difficile de les impliquer dans l’ORSA. Comme un participant l’a formulé : « Ils sont plus intéressés par le volant que par la carte routière. »
Un participant a fait remarquer que l’ORSA constituait un premier pas vers des processus de gouvernance plus rigoureux pour les mutuelles.
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Cet article a préalablement été publié en anglais le 19/09/15. Toutes les citations directes doivent être confrontées à leur version originale en anglais.
Solvency II Wire Français
Solvency II Wire Regular Meeting Group report, September 2015

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