ORSA gagne du terrain

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[widget id=”adsanity-single-2″] Cet article a préalablement été publié en anglais le 13/09/15. Toutes les citations directes doivent être confrontées à leur version originale en anglais.

REMARQUE

Kathryn MorganKathryn Morgan, directrice des opérations réglementaires de la GFSC évoque les rapports ORSA soumis par les compagnies d’assurance de Gibraltar et explique comment ces rapports contribuent à façonner et à élargir la réflexion du régulateur sur la réglementation des services financiers.

 

Les bons et les mauvais côtés d’ORSA pour Gibraltar

Comme cela avait été souligné dans le rapport Sharma qui avait planté le décor de Solvabilité II (en 2002, c’est-à-dire il y a une éternité), les défaillances des assureurs sont presque toujours causées par une mauvaise gouvernance ou par une mauvaise appréhension du risque, voire par les deux à la fois. Le processus ORSA joue un rôle crucial dans la gestion de ces risques en ce sens qu’il fournit à la direction d’une entreprise la discipline lui permettant de mieux comprendre et de mieux gérer ses risques et ses besoins de fonds propres. Il aide ainsi la direction à affiner ses business plans et à prendre des décisions stratégiques éclairées, en fonction de ces risques et du niveau de capital de solvabilité requis pour l’entreprise. Les assureurs de Gibraltar ont soumis leurs premiers rapports ORSA fin 2014, conformément aux orientations préparatoires de l’AEAPP. La GFSC a examiné une cinquantaine de rapports et a fait part de ses commentaires aux intervenants du marché. Comme prévu et vu qu’il s’agissait d’un galop d’essai, les résultats ont montré de grandes différences, confirmant l’utilité de cette phase préparatoire. Notre évaluation interne a montré que 80 % des rapports ORSA étaient présentés de façon suffisante, tandis que les 20 % restant mériteraient d’être progressivement améliorés. Le côté positif est que nous observons un engagement clair de l’équipe dirigeante et que cela donne lieu à la production d’un document d’une taille adaptée aux besoins des membres du Conseil. Le fait de disposer d’un résumé de la stratégie d’entreprise de la société est un autre aspect positif et cela a permis de mettre en perspective l’examen des risques et les projections pour le futur. Cependant, il y a quelques domaines où il nous est apparu que les travaux ORSA de certaines sociétés présentaient quelques lacunes ; ces sociétés auraient dû mettre plus l’accent sur les aspects prospectifs et notamment les relier davantage à la stratégie d’entreprise. D’autres sociétés devront améliorer l’équilibre entre les aspects quantitatifs et les aspects qualitatifs. L’exercice a également mis en évidence la nécessité de procéder à plus de tests de résistance pour les risques substantiels autres que le risque le plus élevé. Le secteur a déjà fait un long chemin pour en arriver là. Nous nous attendons à ce que les rapports ORSA que nous recevrons d’ici fin 2015 soient de mieux en mieux conçus et à ce que les évaluations ORSA soient mieux intégrées aux processus d’élaboration des business plans des sociétés. La GFSC est actuellement en train de revoir ses processus de surveillance de sorte qu’ils soient parfaitement en ligne avec les exigences des orientations de l’AEAPP à cet égard. L’un des critères clés de la mise en place de la procédure de surveillance de Solvabilité II au niveau de la société sera d’appréhender les défis auxquels elle sera confrontée et qu’elle aura documentés dans son rapport ORSA le plus récent.  Par exemple, les risques affectant la stratégie et les business plans de la société, et comment elle gère ces risques. Les sociétés bien gérées ont tout à gagner à bien conceptualiser leurs risques et la façon de les minimiser. A contrario en effet, des rapports ORSA insatisfaisants sont des indicateurs d’une gouvernance médiocre ou d’une gestion des risques médiocre, ou bien les deux à la fois. Compte tenu des conclusions du rapport Sharma, cela nous préoccupe en tant qu’instances de régulation.

Le paradoxe du « document vivant »

Le processus ORSA peut être assimilé à un processus « vivant ». Cependant, si nous faisons référence au document ORSA comme à un « document vivant », comme le font certains, nous prenons le risque qu’il ne soit jamais finalisé ; en fait la notion de « document vivant » est quelque chose que je ne peux tolérer. Il est important que le Conseil soit très clair sur la version du document ORSA qu’il approuve et sur les changements qu’il a approuvés par rapport à la version précédente.

L’influence positive d’ORSA

Des administrateurs non exécutifs nous ont dit qu’ils trouvaient qu’ORSA était un mécanisme particulièrement concret et utile qui les aidait à mieux comprendre ce que Solvabilité II apportait à leur société et à mieux appréhender les risques auxquels elle était confrontée. Nous continuons à échanger avec ces parties prenantes et nous les encourageons à utiliser le processus ORSA pour qu’il les aide à appréhender comment la société peut tirer parti de Solvabilité II pour améliorer constamment sa gouvernance, la maîtrise de ses risques, la gestion de ses fonds propres et sa communication financière. Un résultat positif et quelque peu surprenant d’ORSA est que les entreprises le trouvent utile au-delà du contexte de Solvabilité II. Nous connaissons par exemple un assureur dont la société mère, une société de services non financiers, prévoit de créer un processus et un rapport analogues à usage interne, afin d’améliorer ses procédures de gestion des risques et la gouvernance qui y est associée. Cela nous a incités à nous pencher plus attentivement sur l’utilité d’ORSA pour notre propre usage. Nous considérons que la façon dont ORSA combine l’élaboration des business plans, l’évaluation des risques auxquels est confrontée une entreprise et les incidences en termes de fonds propres et de résultats donne un très bon aperçu du fonctionnement d’une entreprise, et nous recourons nous-mêmes à ce type d’analyse pour élaborer nos programmes de surveillance. Nous travaillons également, en collaboration avec les sociétés licenciées par la GFSC, à identifier les risques afférents à nos objectifs de protection du consommateur et de la réputation du territoire. À Gibraltar, le secteur des services financiers réglementés est vaste, allant des banques aux auditeurs en passant par les prestataires de services aux fiducies et aux entreprises. Bien que nous n’exigions pas de toutes les sociétés que nous agréons qu’elles suivent une procédure ORSA, nous sommes en train d’affiner la façon dont nous conduisons notre mission de surveillance en y incluant une évaluation des risques que présente chaque société par rapport à nos objectifs et en tenant compte plus particulièrement de la pérennité du modèle économique proposée par ladite société. Comme Gibraltar fait partie de l’UE, les sociétés qui y sont domiciliées peuvent demander à licencier leurs services sur l’ensemble de l’Union, ce qui permet à une société donnée de vendre ses produits au-delà du territoire de la réglementation duquel elle relève. Notre objectif est de nous concentrer sur les missions d’intérêt général qui sont importantes dans tous les pays et territoires où opèrent les sociétés enregistrées à Gibraltar. Notre réflexion à ce stade est que le produit final parcourt une longue chaîne avant d’être accessible au consommateur. Cette chaîne peut franchir des frontières et certains de ses maillons peuvent ne pas être réglementés. Chaque maillon prélève quelque chose sur l’investissement et le consommateur risque de se retrouver perdant au final, ou trop éloigné de son investissement. Éloignement, cela veut dire une compréhension et une maîtrise moindres. Éloignement veut dire que cela ouvre la porte aux piètres opérateurs, voire aux fraudeurs. Lorsque nous parlons des risques par rapport à nos objectifs, nous pensons plus particulièrement aux risques pour les consommateurs et aux risques pour la réputation de Gibraltar. Par exemple, les contrôles qu’une société exerce sur les fonds des clients pourront être insuffisants, ce qui pourra se traduire par des pertes pour les clients. Ou bien une société pourra être fortement subventionnée par ses actionnaires ou par d’autres entités du groupe auquel elle appartient, ce qui signifie que son modèle économique n’est pas viable à long terme. En nous inspirant des principes ORSA, nous sommes alors à même de prendre les mesures de surveillance adaptées aux risques. Parallèlement à cela, nous donnons des conseils aux différents secteurs sur ce que nous attendons de leur part. Les pays tiers cibles (c’est-à-dire hébergeurs) offrent une protection réglementaire aux consommateurs, à l’instar de la FCA au Royaume-Uni. Cependant, le problème demeure. Nous avons instauré des relations proactives et productives avec les responsables des instances de régulation des principaux marchés dans lesquels nos sociétés opèrent. Je pense que les régulateurs ne peuvent simplement pas tout faire. Nous sommes en mesure de regarder la culture d’entreprise ou la chaîne de distribution et de coopérer au niveau international. Nous sommes conscients que les contraintes réglementaires d’un pays peuvent donner lieu, si elles sont transposées dans un autre pays, à des comportements inappropriés. Par exemple, le relèvement du seuil minimal des fonds propres pourra se traduire par des pressions sur les bénéfices et donner lieu à des pratiques commerciales plus agressives. Je souhaiterais que cette question fasse l’objet de plus de discussions entre les régulateurs ; la seule référence que j’ai pu trouver à ce sujet figure dans  le « Nouveau modèle de règlement financier » où le Groupe des utilisateurs de services financiers (FSUG) de la Commission européenne a évoqué cette question en 2012. Aucune mesure ne semble avoir été prise depuis lors. Le FSUG suggère que les régulateurs se comportent comme des « super consommateurs » et se concentrent sur les problèmes de fond (par exemple les frais élevés des banques d’investissement qui sont répercutés au consommateur final). La solution relève des dirigeants des sociétés. Les chefs d’entreprise doivent commencer par se mettre à la place de leurs clients. Par client, j’entends la personne à l’extrémité de la chaîne, pas les intermédiaires. Posez-vous les questions suivantes : que veulent-ils ? Où sont-ils ? Comment accèdent-ils à vos services ? Y a-t-il des choses dont ils pourraient avoir besoin, mais dont ils n’ont pas conscience ? Autorisez-vous certaines parties de votre organisation à se comporter d’une manière qui mettrait vos clients en danger ? Une fois que vous aurez répondu à ces questions, vous serez alors en mesure d’éliminer les pratiques inadaptées et de revenir à vos objectifs fondamentaux en tant qu’entreprise. ORSA n’est pas un exercice de conformité. Connaître et respecter les règles devrait être l’exigence minimum. Naturellement, les sociétés se doivent de vérifier la tolérance au risque et la situation financière de l’investisseur. Naturellement, elles se doivent d’en tenir compte. Ceci dit, il leur incombe surtout de regarder au-delà des règles et plutôt ce qui se joue dans le cadre de la relation entre l’investisseur et son conseiller. — L’auteure est directrice des opérations réglementaires à la Gibraltar Financial Services Commission. Les opinions exprimées sont celles de l’auteure. Pour vous abonner à la liste de diffusion gratuite de Solvency II Wire, articles en français uniquement, veuillez cliquer ici. Cet article a préalablement été publié en anglais le 13/09/15. Toutes les citations directes doivent être confrontées à leur version originale en anglais. Solvency II Wire Français ORSA sprawl 2

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